Le pléistocène, c’était il y a très longtemps avant Jésus-Christ. Mais alors, vraiment longtemps. Une période où l’homme n’était définitivement pas le seul maître à la surface de la terre. Les prédateurs étaient alors nombreux à commencer par les Smilodons plus communément appelé « Tigres à dents de sabre »…

Le pitch

Alors qu’un éclair déchire le ciel, une femelle Smilodon met bas donnant ainsi naissance à 3 petits fauves. Mais alors que les deux premiers paraissent tout à fait normaux, le troisième qui voit le jour présente des particularités pour le moins étonnantes parmi ses congénères. A défaut d’être tigré, son corps est plutôt tacheté et présente une longue queue qui, j’en presque sur, vous rappellera sans doute un certain Marsupilami.

Le temps passe et notre « vilain petit canard » devient rapidement une espèce de mascotte au sein de la meute. On joue avec lui, on le mordille, on le chahute. Des moments d’innocence mais déjà, les premiers signes d’exclusions se font jour. Il en faut cependant plus pour décourager notre petit félin candide curieux de tout ce qui l’entoure, n’hésitant pas à partir en escapade dès qu’il le peut. A ses yeux, l’environnement est d’abord un terrain de jeu avant d’être un espace hostile où la loi du plus fort l’emporte à tous les coups.

De ballades en gambades, il n’en presqu’à sa tête. Jusqu’au jours où l’un des smilodons l’écarte pour de bon de la meute. Livré à lui-même, le petit animal y voit une opportunité d’explorer les alentours. Il faut dire que désormais, sa dentition a évolué et qu’il arbore sans complexe une belle canine à défaut d’en avoir deux. Une façon pour lui de mordre la vie à pleine dents. Surtout qu’elle risque de lui offrir pas mal de surprises, la vie !

Ce que l'on peut en dire

Eric Feres, cela ne vous dira sans doute rien et à moi non plus. Fonctionnaire à temps plein, l’auteur est repéré lors d’une exposition en 2012 et publie cette année son tout premier album. Une très belle manière de souffler ses 40 bougies.

On ne le dira jamais assez mais réaliser un album de bande dessinée muette est une gageure qui n’est pas à la portée de tout le monde. Surtout qu’ici l’album fait 250 pages. Le premier point fort du livre est bien évidemment à mettre au crédit de l’animal central de ce livre incarné par notre petit tigre au sourire enjoué qui contraste tellement avec l’univers sauvage ambiant. Peu importe les protagonistes qui l’entourent, tout n’est que jeu pour lui. « Quelques grammes de finesse dans un monde de brutes » serait-on tenter penser à la vue de ce petit félin, véritable lueur d’espoir dans cet univers des plus sauvages.

Le découpage donne pour sa part énormément de rythme à l’histoire. Dessins pleine page, pages en gaufrier, gros plans, c’est extrêmement varié. La représentation de la faune et de la flore est elle aussi très diversifiée, l’auteur n’hésitant pas à représenter les éruptions volcaniques, la vie des océans ou encore la glaciation qui ronge inexorablement plaines et forêts.

D’une certaine manière, Eric Feres nous offre le condensé d’une époque en somme, se permettant aussi de lorgner quelque peu vers le psychédélisme. Un peu plus dur à cerner, cet aspect participe cependant à la poésie de l’album et son originalité. Un premier livre aboutit, témoignant d’une impressionnante maîtrise et un vrai exercice de style si l’on aime les bd animalières comme Zoo de Frank Pé. Un livre qui a les crocs! (ok elle était facile)

Sabre d’Eric Feres, éditions Dargaud, 16,95 €

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– Alexandre Jacob