Créée en 1938 par Bob Kane et Bill Finger, les aventures du Chevalier Noir ont été déclinées sous de très nombreuses coutures à travers le nombre pléthorique de dessinateurs et scénaristes s’étant emparé du personnage. Batman White Knight réalisé par Sean Murphy illustre une fois de plus comment ce héros n’a cessé d’être réinventé au gré des époques.
Le pitch
Une fois de plus, le Joker, fait des siennes. Une fois de plus, le chevalier noir est bien décidé à l’alpaguer pour le ramener pieds et poings liés à l’asile d’Arkham. Sauf que depuis quelques temps, Batman n’en fait qu’à sa tête, ravageant tout ou presque sur son passage, aveuglé par une irrépressible soif de justice.
Ayant acculé son pire ennemi dans un entrepôt pharmaceutique, le super-héros s’en prend violemment au Joker, le forçant à ingurgiter des pilules de médicaments non homologuées et vouées à la destruction. Une bavure de trop pour l’homme chauve-souris, filmée en catimini et qui se retrouve très rapidement sur les réseaux sociaux. De quoi discréditer le justicier et alimenter ce qui devient dès lors le BAT GATE !
Chose inattendue, les pilules ont eu un effet sans précédent pour le Joker, allant jusqu’à faire disparaître sa personnalité de psychopathe pour laisser place à celui qu’il fut autrefois, à savoir, Jack Napier, le comique raté. Outre ses capacités physiques recouvrées, Napier a également décuplé ses capacités mentales lui permettant d’acquérir un statut de génie, test de QI et scanner à l’appui.
Bien décidé à se construire une respectabilité malgré son très lourd passif de super vilain, Jack Napier décide de porter plainte contre Batman ainsi que la police et la ville de Gotham tout en assurant lui-même sa défense, rien que ça !
Avec un plaidoyer éloquent et brillant, Napier marque les esprits se revendiquant d’être le chevalier blanc de Gotham tout en étant bien décidé à œuvrer pour le bien de la ville. Une intégrité de façade qui cache pourtant une manipulation bien plus complexe qu’il n’y paraît !
Ce que l'on peut en dire
Batman fêtera cette année ses 80 printemps et force est de constater que la franchise demeure toujours dans le coup lorsque des auteurs talentueux tels que Sean Murphy sont aux manettes. Bien sur, l’affrontement entre Batman et le Joker n’est pas nouveau (Batman Killing Joke en est l’archétype même) mais l’originalité avec ce « White Knight » est d’inverser les rôles, le Joker devenant un défenseur des opprimés fustigeant la corruption policière et les débordements de Batman.
Que les puristes se rassurent, tous les ingrédients faisant le succès de la franchise sont là. Mais la psychologie des personnages est clairement fouillée, intégrée dans notre époque avec de nombreuses références aux réseaux sociaux que nous utilisons au quotidien.
La pagination est conséquente, le design notamment des véhicules soigné à tel point que l’auteur s’est amusé à dessiner la plupart des modèles de Batmobiles apparaissant aussi bien dans les films de Tim Burton que dans la série animée des années 1990 ou dans le feuilleton des années 1960. De quoi revisiter certains pans un peu occultés de l’univers Batman tout en demeurant très actuel par les thématiques abordées, notamment politiques.
Batman White Knight sort ainsi clairement des sentiers battus et offre une vision tout sauf manichéenne d’un univers incontournable de la bande dessinée nord américaine. La chauve souris a encore de beaux jours devant elle!